S'évader, sortir de son cadre habituel, rompre avec les contraintes de la vie quotidienne sont des aspirations omniprésentes dans la société d'aujourd’hui. Le temps libre et les loisirs sont des droits acquis (au prix de longues luttes sociales pour la réduction du temps de travail), sur lesquels la
législation ne saurait revenir. Ils sont désormais intégrés dans les mentalités et constituent un secteur économique à part entière. L'image de l'évasion, imposée par les médias et accompagnée d'un certain culte du corps et de la santé, est si prégnante qu’elle est ressentie comme un besoin psychophysiologique, au point de donner un nouveau sens au proverbe chinois : « Un jour de loisir, c’est un jour d'immortalité. »
LE TEMPS LIBRE
Pourtant, il riy a pas cinquante ans que le temps libre bénéficie d’une râleur positive. Encore ce temps dégagé des astreintes du travail n'est-il pas totalement libéré, loin s’en faut, d'obligations qui y participent ou s’y apparentent.
L’invention du temps libre
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les Français des siècles passés avaient plus de temps libre que ceux d’aujourd’hui. Au début du xviii® siècle, l'année comportait 84 jours fériés et environ 80 jours où des raisons diverses rendaient le
travail impossible (santé, météo, affaires, etc.). Aujourd'hui, les Français disposent généralement de 11 jours de fêtes officielles, de 52 dimanches, et de 30 jours de congés payés, à quoi s'ajoutent les 52 samedis (ou un autre jour de récupération), ce qui porte à 145 le nombre de jours sans travail, alors qu'au xviii® siècle on estimait à environ 164 le nombre des jours « chômés ». Mais ce temps libéré, qui
avait d'abord une fonction religieuse, n’était pas vécu comme une alternance au travail; au contraire, il en était un substitut indésirable. Non payés, les jours chômés, pour le savetier de la fable, par exemple, étaient un fléau : « Le mal est que dans l’an s’entremêlent des jours qu’il faut chômer : on nous ruine en fêtes. » Le temps libre n'avait pas alors une valeur propre, positive.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire